Copenhague 2009. Lettre ouverte aux Chefs d’État et de Gouvernement participants à la conférènce internationale de l’ONU.

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À Leurs Excellences.

Les Chefs d’État ou de Gouvernement.

À l’aube de ce siècle nouveau, le Sommet des Nations Unies sur le climat sera l’occasion historique de rassembler les plus hautes instances politiques à la sauvegarde de la planète. La Terre souffre. Notre Terre mère ne souffre que trop et déjà les signes sont annoncés. Notre mère Terre gronde et demain elle rugira de colère. Ce réchauffement a sans doute des raisons géophysiques et humaines, naturelles et culturelles. Mais la brume de notre pensée empêche de discerner le sens des politiques écologiques suivies. Le réchauffement accéléré en est responsable et nous sommes à cet égard, comme citoyens de la planète, dans les plus grandes expectatives.

Excellences, vous avez l’occasion historique à Copenhague de construire un autre modèle et de rendre hommage à la planète où nous vivons tous. Dans le Nord, comme dans le Sud, comme en Occident, comme en Orient, il faut que la conscience de tous devienne une conscience écologique. L’homme n’est pas venu sur Terre pour domestiquer la Nature, mais pour s’y intégrer en la respectant. Il y a une force spirituelle que la Nature nous envoie par le bleu du Ciel, dans la corolle des fleurs éphémères, la fragilité et la beauté des fleurs, dans la force d’un arbre d’olivier qui regarde avec sa force constructive et tenace à l’éternité.

Pour le peuple Inuit, le souffle du vent peut, dans ses ondes sonores, être interprété comme un message de l’au-delà, du pays des morts. Nous trouvons aussi comme notre éclaireur les paroles prononcées en 1854 du chef Amérindien Seattle devant l’assemblée des tribus d’Amérique du nord en réponse au président de l’époque G.Cleveland:

«Nous savons que l’homme blanc ne comprend pas nos moeurs. Une parcelle de Terre ressemble pour lui à la suivante, car c’est un étranger qui arrive dans la nuit et prend à la Terre ce dont il a besoin. La Terre n’est pas sa soeur, mais son ennemi, et lorsqu’il la conquise, il va plus loin. Il abandonne la tombe de ses aïeux, et cela ne le tracasse pas. Il enlève la Terre à ses enfants et cela ne le tracasse pas. La tombe de ses aïeux et le patrimoine de ses enfants tombent dans l’oubli. Il traite sa mère la Terre , et son frère le Ciel, comme des choses à acheter, piller, vendre comme les moutons ou les perles brillantes. Son appétit dévorera la Terre et ne laissera derrière lui qu’un désert.

Je ne sais pas. Nos moeurs sont différentes des vôtres. La vue de vos villes fait mal aux yeux de l’homme rouge. Mais peut-être est-ce parce que l’homme rouge est un sauvage et ne comprend pas. Il n’y a pas d’endroit possible dans les villes de l’homme blanc. Pas d’endroit pour entendre les feuilles se dérouler au printemps ou le froissement des ailes d’un insecte. Mais peut-être est-ce parce que je suis un sauvage et je ne comprends pas. Le vacarme semble seulement insulter les oreilles. Et quel intérêt y a-t-il à vivre si l’homme ne peut entendre le cri solitaire de l’engoulevent ou les palabres des grenouilles autour d’un étang la nuit ? Je suis un homme rouge et ne comprends pas.

L’Indien préfère le son doux du vent s’élançant au-dessus de la face d’un étang, et l’odeur du vent lui-même, lavé par la pluie de midi ou parfumé par le pin pignon. L’air est précieux à l’homme rouge, car toutes choses partagent le même souffle, la bête, l’arbre, l’homme, ils partagent tous le même souffle. L’homme blanc ne semble pas remarquer l’air qu’il respire. Comme un homme qui met plusieurs jours à expirer, il est insensible à la puanteur. Mais si nous vous vendons notre Terre, vous devez vous rappeler que l’air nous est précieux, que l’air partage son esprit avec tout ce qu’il fait vivre. Le vent qui a donné à notre grand-père son premier souffle a aussi reçu son dernier soupir. Et si nous vous vendons notre Terre, vous devez la garder à part et la respecter, comme un endroit ou l’homme blanc peut aller goûter le vent adouci par les fleurs des prés. Comment pouvez-vous acheter ou vendre le Ciel, la chaleur de la Terre ? L’idée nous paraît étrange. Si nous ne possédons pas la fraîcheur de l’air et le miroitement de l’eau, comment est-ce que vous pouvez les acheter ? Chaque parcelle de cette Terre est sacrée pour mon Peuple.Chaque aiguille de pin luisant, chaque rive sableuse, chaque lambeau de brume dans les bois sombres, chaque clairière et chaque bourdonnement d’insecte sont sacrés dans le souvenir et l’expérience de mon peuple. La sève qui coule des arbres transporte les souvenirs de l’homme rouge. Les morts des hommes blancs oublient le pays de leur naissance lorsqu’ils vont se promener parmi les étoiles. Nos morts n’oublient jamais cette Terre magnifique, car elle est la mère de l’homme rouge. Nous sommes une partie de la Terre, et elle fait partie de nous.

Les fleurs parfumées sont nos soeurs, le cerf, le cheval, le grand aigle, ce sont nos frères. Les crêtes rocheuses, les sucs dans les prés, la chaleur du poney et l’homme tous appartiennent à la même famille. Aussi lorsque le grand chef de Washington envoie dire qu’il veut acheter notre Terre. Le grand chef envoie dire qu’il nous réservera un endroit de façon que nous puissions vivre confortablement entre nous. Il sera notre père et nous serons ses enfants. Nous considérerons donc votre offre d’acheter notre Terre. Mais ce ne sera pas facile. Car cette Terre est sacrée. Cette eau scintillante qui coule dans les ruisseaux et les rivières n’est pas seulement de l’eau, mais le sang de nos ancêtres. Si nous vous vendons de la Terre, vous devez vous rappeler qu’elle est sacrée et que chaque reflet spectral dans l’eau claire des lacs parle d’évènements et de souvenirs de la vie de mon peuple. Le murmure de l’eau est la voix du père de mon père. Les rivières sont nos soeurs, elles étanchent notre soif. Les rivières portent nos canoés et nourrissent nos enfants.

Si nous vous vendons notre Terre, vous devez désormais vous rappeler, et l’enseigner à vos enfants, que les rivières soient nos soeurs et les vôtres, et vous devez désormais montrer pour les rivières la tendresse que vous montreriez pour une soeur. Nous considérerons donc votre offre d’acheter notre Terre. Mais si nous décidons de l’accepter, j’y mettrai une condition : l’homme blanc devra traiter les bêtes de cette Terre comme ses frères. Je suis une personne et je ne connais pas d’autre façon de vivre. J’ai vu un millier de bisons pourrissant sur la prairie, abandonnés par l’homme blanc qui les avait abattus d’un train qui passait.

Je suis une personne et je ne comprends pas comment le cheval de fer fumant peut-être plus important que le bison que nous tuons que pour subsister. Qu’est-ce que l’homme sans les bêtes ? Si toutes les bêtes disparaissaient, l’homme mourrait d’une grande solitude d’esprit. Car ce qui arrive aux bêtes arrive bientôt à l’homme. Toutes les choses se tiennent. Vous devez apprendre à vos enfants que le sol qu’ils foulent est fait des cendres de nos aïeux. Pour qu’ils respectent la Terre, dites à vos enfants qu’elle est enrichie par les vies de notre race.

Enseignez à vos enfants tout ce que nous avons enseigné aux nôtres, que la terre est notre mère. Tout ce qui arrive à la Terre arrive aux fils de la Terre. Si les hommes crachent sur le sol, ils crachent sur eux-mêmes. Nous savons au moins ceci : la Terre n’appartient pas à l’homme, l’homme appartient à la Terre. Cela, nous le savons. Toutes choses se tiennent comme le sang unit une famille. Toutes choses se tiennent. Tout ce qui arrive à la Terre arrive aux fils de la Terre. Ce n’est pas l’homme qui a tissé la trame de la vie : il en est seulement un fil. Tout ce qu’il fait à la terre, il le fait à lui-même […] ».

Excellences, depuis des millénaires, les peuples de l’Afrique, les peuples Amérindiens, de l’Amazonie, les peuples autochtones d’Australie, eux, le savent. Et, ce n’est pas par hasard qu’ils résistent dans toutes les contrées du Monde. Il y a près d’eux comme un sens de l’Histoire jamais oubliée. Nous vous prions de retrouver ce sens, de rejoindre à Copenhague un accord international ambitieux et rendre hommage ainsi au Panthéon de l’Humanité.

Fabio Gualtieri

Claudio Poletti

Antonio Torrenzano

 

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